La confrontation Etats-Unis Chine après Trump : que doit faire l’Europe ?

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Auteur: André Chieng, publication apparue dans La Lettre De La Chine Hors Les Murs n° 38,  le 24 nov. 2020

Que la Chine ait reconnu tardivement la victoire de Joe Biden, par la voix impersonnelle du porte-parole du ministère des Affaires Étrangères, a fait penser que la Chine aurait préféré la victoire de Donald Trump. Cela peut paraître paradoxal vu que Trump lui-même s’était auto-déclaré le pire ennemi de la Chine et qu’il a accusé cette dernière de tout faire pour favoriser la victoire de son rival. En voici l’explication couramment avancée : les deux candidats ont affiché résolument leur opposition à la Chine, mais pour cette dernière, la brutalité de Trump, prompt à se faire des ennemis partout, était préférable à l’empathie de Biden bien plus susceptible de rassembler les alliés de l’Amérique dans une croisade antichinoise.

Et si Trump avait gagné ?

Lors de cette élection, les Chinois sont passés par trois phases.

D’abord, dans la période pré-électorale, ils ont craint que dans son imprévisibilité et son mépris des règles de la politique internationale, Trump ne déclenche une crise grave en voulant se donner une image de force. Qu’auraient-ils fait si par exemple Trump avait décidé de se rendre à Taïwan ? Qu’il n’ait commis aucun acte irréparable de ce type a soulagé les Chinois !

Ensuite, les Chinois auraient sans doute préféré la victoire de Trump, mas pour des raisons peut-être différentes de celles avancées plus haut. En effet, ils pensent qu’une part des attaques antichinoises trumpiennes s’explique par des raisons électoralistes. S’il avait été élu, il aurait modifié sa politique envers la Chine : la conduite de Trump montre que ce dernier n’est pas vraiment un tueur contrairement à ce qu’on pense. Ainsi, avant Huawei, il aurait pu tuer ZTE. Il ne l’a pas fait, se contentant d’une lourde amende et d’un contrôle strict de la gouvernance de ZTE. Tuer les champions chinois de la technologie toucherait les champions américains qui sont leurs fournisseurs. Mieux vaut les maintenir en vie, sous contrôle. L’obligation de demander des licences à l’administration américaine pour vendre aux sociétés hightech chinoises, s’étendant aux groupes étrangers, donne aux États-Unis une liste exhaustive de qui vend quoi à la Chine. Un vaste marchandage était dès lors possible, les États-Unis contrôlant les progrès de la Chine tout en poussant celle-ci à substituer des fournisseurs américains à ceux d’autres pays. Or, cette négociation aurait pu aboutir car pour les Chinois, plus que pour d’autres peuples, tant qu’on n’est pas mort, on peut toujours espérer un retournement de situation. La Longue Marche elle-même n’est-elle pas une défaite des troupes communistes qui fut aussi l’amorce de leur victoire finale de 1949 ?

La victoire de Biden redistribue les cartes. Les Chinois sont donc maintenant dans l’expectative, avec une seule certitude : l’hostilité américaine envers la Chine ne disparaîtra pas tout simplement parce que les Etats-Unis ne tolèrent pas qu’un autre pays puisse les dépasser, que ce soit l’Union Soviétique, le Japon ou la Chine ! Mais Biden présente un avantage : il est bien plus prévisible que Trump !

Stratégie chinoise

Comment les Chinois se sont-ils préparés au résultat de cette élection ?

En 2016, ils avaient été pris par surprise : aucun think-tank chinois n’avait ne serait-ce qu’étudié l’éventualité d’une victoire de Trump. En 2020, ils se devaient d’être prêts à n’importe quelle éventualité.

Pour comprendre leur stratégie, il n’est pas inutile de relire un essai, parmi les plus célèbres écrits par Mao : De la contradiction (1937) Dans ce texte, Mao affirme d’abord l’unité des contraires. Le monde est fait de contradictions, mais il faut savoir distinguer la contradiction principale des autres.

Dans notre cas, la contradiction principale est la rivalité Chine-États-Unis.

Puis dans la contradiction principale, il faut distinguer entre les aspects principaux de la contradiction et les autres. Là, ce sont les faiblesses de la Chine qui sont en jeu. Et elles sont importantes.

D’abord, les foyers de désordre possibles en Chine dont pourraient profiter les États-Unis. Ils sont repérés depuis longtemps et bien connus : le Tibet, le Xinjiang, Hong-Kong et Taïwan. C’est ce qui explique les mesures prises par la Chine envers le Xinjiang et Hong-Kong. La Chine ne pouvait pas tolérer que ces deux endroits deviennent des foyers d’oppositions qui pourraient être actionnés aisément par les États-Unis. Le prix à payer est lourd. La Chine voit sa popularité dans le monde s’effondrer à des niveaux historiquement bas, mais elle considère qu’elle n’a pas le choix : il lui faut traiter l’aspect principal de la contradiction.

Ensuite, il faut faire face à la faiblesse technologique. Au cours de ces dernières semaines, Xi Jinping a multiplié les discours : lors du plénum du Comité Central fin octobre, mais auparavant, à Shenzhen pour célébrer le 40ème anniversaire de la zone économique puis après, à Pudong, pour en célébrer le 30ème anniversaire. De nombreux messages ont été diffusés : sur la nouvelle politique économique, appelée circulation duale, sur l’objectif d’aisance modeste, sur l’éradication de la pauvreté, sur la préservation de la culture chinoise, … Mais un thème est omniprésent : l’innovation.

L’innovation est devenue une clef de voûte de la stratégie chinoise car elle se situe au croisement de deux impératifs absolus :

– Un géostratégique : assurer autant que possible l’autonomie technologique de la Chine

– Un économique : comme l’ont répété la Banque Mondiale et le DRC (Development and Research Center), la Chine fait face aujourd’hui au piège du revenu moyen dans lequel sont tombés tant de pays émergents pourtant bien partis ! Et les quelques pays ayant échappé à ce piège, notamment les dragons asiatiques, l’ont fait en améliorant sans cesse la productivité totale des facteurs … Grâce à l’innovation.

Une chance pour l’Europe

D’aucuns s’inquiètent : la Chine ne serait-elle pas en train d’évincer les sociétés étrangères du marché chinois ? L’objectif d’autonomie, ouvertement recherché, n’en est-il pas le signe le plus visible ? La circulation duale, mettant au premier plan un cycle économique autocentré, n’en est-elle pas une illustration de plus ?

A cette inquiétude, Xi Jinping a tenu à répondre lui-même : la politique d’ouverture de la Chine sera poursuivie ; dans le concept de circulation duale, certes la circulation primaire sera domestique mais la dualité, impliquant l’extérieur et inscrite dans l’intitulé de cette politique, sera maintenue, …

Mais peut-on faire confiance en ce qu’il dit ? Ne cherche-t-il pas à apaiser l’étranger en émettant des promesses qu’il ne tiendra pas ? C’est ce que les États-Unis répètent à l’envi, mais il ne faut pas se tromper : ce combat mené par les États-Unis pour conserver la suprématie mondiale n’est pas celui de l’Europe dont l’intérêt est d’être capable de choisir à chaque moment ce qui lui convient le mieux.

L’obsession de la Chine pour l’innovation constitue la meilleure chance pour l’Europe. On a beaucoup accusé la Chine d’avoir assis son spectaculaire développement sur les transferts de technologie forcés, voire sur leur vol. C’est exagérer la naïveté des sociétés occidentales qui en auraient été victimes : les transferts de technologie étrangère ont réellement aidé la Chine à rattraper son retard, mais dans leur écrasante majorité, il ne s’agissait pas des technologies les plus nouvelles ! Regardons maintenant quelques chiffres : la Chine investit en R&D l’équivalent de 2,2% de son PIB en 2019, ce qui est tout à fait honorable. Mais la plus grande partie se dirige vers le développement bien plus que vers la recherche. La proportion consacrée à la recherche n’est que de 5 à 6% du total, contre 18% aux États-Unis et 25% en France ! (Chiffres chinois). A cela se rajoute une autre constatation : les grandes sociétés d’État chinoises sont puissantes, mais peu innovantes. L’innovation est le fait de sociétés privées et de sociétés étrangères. Plus que d’investissements encore, l’innovation nécessite de penser différemment. Les dirigeants chinois le savent et c’est favorable à l’Europe.

La confrontation technologique États-Unis Chine perdurera. Tout le monde en est convaincu. Le gouvernement américain se donne le droit d’empêcher toute coopération technologique avec la Chine au point de bannir les étudiants chinois des universités américaines. La Chine a besoin d’autres partenaires et l’Europe est le candidat idéal. La complémentarité entre les deux est évidente : l’Europe a besoin du marché chinois et la Chine a besoin de la coopération technologique avec l’Europe. Cela ne signifie pas un alignement des positions de l’Europe avec la Chine. Le RCEP signé le 15 novembre dernier entre 15 pays d’Asie et d’Océanie, comprenant des pays aux idéologies et intérêts contradictoires comme la Chine, le Japon et l’Australie ouvre une voie nouvelle vers un monde où le en même temps Macronien rencontre l’unité des contraires de Mao.

 

Chine: Village 2.0 — un reportage intéressant sur le développement du E-commerce en Chine rurale

Un reportage intéressant sur ARTE que j’ai partagé avec mes élèves de l’école du commerce. On parlait en classe du marché de E-commerce en Chine, qui a atteint 800 milliards d’euros en 2017!

Les 2 histoires racontées dans le film illustrent bien cet incroyable phénomène, qui touche aujourd’hui non seulement les grandes villes, mais aussi la Chine rurale profonde.

Su Junpin est un jeune entrepreneur issue d’une modeste famille de la campagne du Yunnan. Il a fait fortune en commercialisant en ligne des théières en argent, fabriquées par des artisans de son village, vendues en Chine, en Corée et même en Europe. Ainsi il a refait vivre l’art traditionnel local, et employant plus de 300 villageois pour son entreprise.

Comme lui, Lu Zhenhong de la province de Zhejiang a fondé son empire en ligne en vendant du matériel de camping. Des milliers d’emplois ont été créés dans cette région grâce à son entreprise, dont le modèle s’est décliné dans toute la province.

L’essor du E-commerce est très étroitement lié avec l’encouragement du gouvernement chinois. En effet, la Chine voit cette nouvelle forme de commerce comme un des leviers principaux pour développer l’économie des régions rurale, dont le niveau de vie souffre encore de l’inégalité par rapport aux grandes villes. 

Selon le reportage, « la révolution 2.0 a d’ores et déjà permis à des millions de paysans chinois de troquer la bêche pour le Net! »

WeChat marketing power

quotation from Jay Yarrow www.business.insider

This tweet from China-based angel investor Rui Ma shows how powerful China’s social networking app WeChat is becoming:

Ce que l’app star chinois WeChat peut faire …

As you can see, with WeChat integration a user can print out photos, control a smart air conditioner, and buy from a vending machine, all through QR codes with apps.

WeChat is a part of Tencent, $150 billion Chinese Internet company. WeChat has more than 400 million users and it only launched a little bit more than years ago. It’s primarily a messaging app, similar to WhatsApp, its western counterpart, but it’s been expanding its services into other areas, including travel booking, taxi and payments. 

Becoming today the no 1 powerful social media in China, WeChat is showing strong influential power in terms of marketing and communication for companies and brands. 70% of its users are under 30’s, predominantly from urban areas, very affluent and strongly interconnected through the «group chats».

WeChat platform allows brands to communicate directly with these target consumers and, as a result can have a huge positive impact on brand loyalty. As one of the most common marketing strategies seen on WeChat, brands often offer their followers exclusive content and access to special offers.

Basically all services of CRM could be done also through WeChat, it is an effective way of maintaining loyal consumers and through whom, to attract new ones as many WeChat users are highly selective of whom they follow.

Pomme vs. Cochons

image par BiaoGe ManHua (source weibo.com)

Pour ceux qui s’intéressent un peu à l’actualité chinoise, voilà deux sujets qui ont fait la une de tous les journaux du pays ces derniers temps.

La pomme (la marque Apple) et les cochons (morts hélas) ne relèvent pourtant pas que du problème sanitaire. Si les autorités ont préféré attaquer farouchement la pomme, ils ont choisi de fermer les yeux sur le scandale des 13000 cochons morts qui flottaient dans la rivière de HuangPu à côté de Shanghai. Le contraste d’attitude est tel que les chinois ont fini par se poser des questions sur l’authenticité de l’origine de ces crises. N’était-ce pas autant volontaire dans l’un cas comme dans l’autre? La différence, c’est que sans doute la pomme américaine est bien plus appétissante que la soupe de porc sortant du robinet?

Appétissant, tel est le marché chinois pour la marque à la pomme également. Ainsi après avoir tenu bon sous le bombardement des critiques médiatiques chinoises pendant presque 2 semaines, Apple a cédé en publiant sur son site Internet une lettre en chinois dans laquelle son patron Tim Cook présente des « excuses sincères pour les inquiétudes ou les malentendus suscités » par son entreprise chez ses clients.

Alors que les médias chinois se félicitent, les internautes du pays, quant à eux, ont vite trouvé une explication à cette excuse — elle a été publiée le 1er avril !

Du point de vue d’un communicateur professionnel, la crise d’Apple tout comme le scandale du cochon en Chine reflètent bien une défaillance de plus en plus visible de la machine propagandiste du gouvernement dans cette nouvelle ère Internet des réseaux sociaux.